Rue Saint-Antoine
Ordonné par le contrôleur des finances, Mesme Gallet, la demeure est un hôtel particulier entre cour et jardin, doté d’un accès à la place Royale (actuelle place des Vosges). Édifié par le maître-maçon Jean Notin, sans doute sur les plans de Jacques Ier Androuet du Cerceau, l’hôtel fut achevé pour Roland de Neufbourg, conseiller d’Etat.
En 1634, Maximilien de Béthune, duc de Sully, ministre de Henri IV disgracié par Richelieu après la mort du roi, en prit possession et y passa les dernières années de sa vie. Entièrement construit en pierre de taille, l’Hôtel de Sully possède un logis principal flanqué d’ailes bordant la cour. Fidèles à la silhouette française, les corps de logis sont couverts de combles droits à croupes, avec des lucarnes de pierre, de hautes cheminées et des épis de faîtage en plomb.
Sur la rue Saint-Antoine, la porte cochère, encadrée de colonnes doriques et de fenêtres, relie deux pavillons à soubassement. Chaque pavillon comprend trois travées et un grand arc couronnant l’élévation sur rue. Les baies sont séparées par des refends horizontaux ; à l’étage, elles sont surmontées d’un linteau sculpté et d’un fronton droit.
L’arc du pavillon ouest de l’entrée principale de l’Hôtel de Sully
Les façades des deux pavillons de l’entrée principale sont couronnées d’un grand fronton arrondi, dans le tympan duquel s’ouvre une petite baie, coiffée d’un arc en forte saillie marqué d’une tête de lion, et encadrée de génies tenant des casques.
Le corps de logis principal et l’aile gauche
La façade du corps de logis principal comprend cinq travées. Le perron enjambe un saut-de-loup jusqu’à la porte d’entrée, qui donne accès au passage menant au jardin, mais aussi à l’escalier principal conduisant aux appartements. De part et d’autre de la porte, deux consoles supportent un entablement surmonté d’une petite fenêtre logée entre deux volutes qui soutiennent un fronton curviligne.
Un décor de feuilles d’acanthe et de draperies nouées ornent, autour d’un motif central, le linteau de la porte et celui de la petite fenêtre, ainsi que le tympan du fronton. L’aile gauche se développe sur sept travées et reprend l’ordonnance de la façade du logis principal. L’entrée pratiquée n’y souligne pas le milieu de l’aile, mais l’escalier séparant la partie résidentielle des communs.
Depuis le XIXe siècle, deux sphinges à la tête renversée gardent le perron, en avant du saut-du-loup séparant la cour d’honneur et la façade du corps de logis principal.
Les reliefs des trumeaux de l’une des ailes donnant sur la cour de l’Hôtel de Sully
S’inspirant sans doute des reliefs de l’Hôtel Carnavalet, le décor de l’Hôtel de Sully illustre, sur le mode de l’allégorie, Les Saisons (sur les façades du corps de logis principal) et Les Quatre Éléments (sur les façades sur cour des ailes latérales). Ces allégories sont personnifiés, comme ci-dessus, sur les trumeaux de l’aile droite, à l’étage (La Terre et de L’Eau), par des figures logées dans des niches et sculptées en haut-relief.
Le décor sculpté de la façade du corps de logis principal de l’Hôtel de Sully
De part et d’autre de la figure médiane du logis principal, Bacchus, accompagné d’un fauve, personnifie L’Automne. Revêtu d’une peau de chèvre lui barrant le buste, le dieu passe un bras au-dessus de sa tête pour saisir une grappe de raisin ; il serre une autre grappe de la main droite. A l’extrémité d’une branche qui s’enroule autour d’une jambe, une feuille de vigne couvre pudiquement le sexe de Bacchus, dont la figure est associée au signe du Zodiaque, correspondant à l’équinoxe d’automne.
En pendant à Bacchus, la figure d’un vieillard chauve et barbu, vêtu d’une tunique, nouée à la taille et laissant une épaule dénudée, personnifie L’Hiver. Glissant une main sur sa poitrine et s’appuyant de l’autre sur une canne, il semble s’avancer près d’un feu. A sa droite, un serpent, animal à sang froid, enroulé autour du tronc d’un arbre mort, semble aussi rechercher la chaleur des flammes. La figure de L’Hiver est associée au signe du Zodiaque correspondant au solstice d’hiver.
Le décor sculpté de l’aile droite de l’Hôtel de Sully
Sur la façade de l’aile droite, à gauche, la figure féminine vêtue d’un simple voile pudique, avec une corne d’abondance, personnifie La Terre, première représentation des Quatre Éléments. Elle est associée à l’image d’une truie, emblème de la terre féconde, sculptée sous la corniche.
Le lion complétant l’allégorie de La Terre
Un lion à la longue crinière, gueule ouverte et pattes en avant, se tapit en s’enroulant autour des jambes de l’allégorie de La Terre.
Le décor sculpté de l’aile droite de l’Hôtel de Sully
En pendant à l’allégorie de La Terre, une figure féminine verse l’eau d’un vase posé sur son épaule, debout près d’une urne renversée, qui alimente une rivière bordée de roseaux, où paraît un dauphin. Elle personnifie L’Eau, seconde représentation des Quatre Éléments. Sa figure est associée à l’arc-en-ciel se formant au contact des rayons du soleil, sculptés sous la corniche.
Le décor sculpté de l’aile gauche de l’Hôtel de Sully
Sur la façade de l’aile gauche, la figure féminine vêtue d’un voile pudique, comme suspendue au-dessus d’un paysage, où paraît un caméléon, debout sur un rocher, personnifie L’Air, troisième représentation des Quatre Éléments. Sa figure est associée à la représentation de ce qui semble être un éventail de plumes, sculpté sous la corniche.
Le décor sculpté de l’aile gauche de l’Hôtel de Sully
En pendant à L’Air et opposée à La Terre, une figure féminine paraît vêtue d’un voile s’enroulant autour du bras gauche et de l’épaule droite, à la chevelure rayonnante. Elle semble suspendue au-dessus d’un feu, près d’un dragon à la crinière flamboyante : elle personnifie Le Feu, dernier des Quatre Éléments. Elle semble être associée aux flammes et à l’astre solaire, sculptés sous la corniche.
Une lucarne du logis principal
La décoration de l’Hôtel de Sully se rattache à la tradition maniériste. Au-dessus d’une corniche à modillons, les grandes lucarnes du corps de logis principal, flanquées d’ailerons à grandes feuilles, en présentent un bel exemple : les linteaux sont ornés de rosaces, de palmettes et de têtes de triton. Les frontons courbes sont décorés d’une tête de femme dans des feuillages.
La façade sur jardin du logis principal et l’ « aile neuve » (vers 1658) de l’Hôtel de Sully
Au-devant de la façade sur jardin du logis principal, une terrasse fermée par une balustrade offre un promenoir dominant le jardin. Afin d’aménager de nouveaux appartements, le petit-fils du ministre de Henri IV, prénommé aussi Maximilien, deuxième duc de Sully, et son épouse, Charlotte Séguier, ordonnèrent à l’architecte Pierre Lambert, élève de Louis Le Vau, la construction d’une aile supplémentaire, perpendiculaire au logis principal, à l’emplacement occupé jusque-là par un petit jardin.
Le décor sculpté du logis principal, du côté du jardin
De part et d’autre de la fenêtre médiane du logis principal, la déesse Flore paraît avec une corne d’abondance dans la main gauche et un flambeau dans la main droite. Une corbeille de fleurs est posée à ses pieds : elle personnifie Le Printemps. Elle est associée au signe du Zodiaque correspondant à l’équinoxe du printemps.
En pendant au Printemps, une figure féminine drapée d’une ample draperie, un sein découvert, est représentée debout sur une gerbe de blé et une urne renversée, avec une corne d’abondance dans la main gauche. Sa chevelure est ornée d’épis : elle personnifie L’Été. Elle est associée au signe du Zodiaque correspondant au solstice d’été, sculpté sous la corniche.
L’Orangerie
Au fond du jardin, s’élève un bâtiment en pierre de taille qui servait de serre aux orangers. Il comprend un corps central de cinq travées, compris entre deux pavillons, sous des toits autonomes à hauts combles. Le rez-de-chaussée est percé d’ouvertures en plein cintre soulignées de refends et l’étage, de lucarnes pendantes couronnées de frontons sculptés. Les pavillons comprennent deux travées en façade ; celui de droite communique directement avec l’ancienne place Royale, désormais place des Vosges.
Le cadran solaire de l’Orangerie
Depuis la fin du XVIIIe siècle, un cadran solaire vertical déclinant de l’après-midi a été gravé dans la pierre, au-dessus de l’arcade médiane du corps central de l’orangerie. Le gnomon (ou style) du cadran de l’Hôtel de Sully est entouré d’un croissant de lune.